jeudi 17 octobre 2013

Musées by Lux, Nu aux bas rouges, Picasso

Nu aux bas rouges, Picasso




Nu aux bas rouges est une femme sûre d’elle, c’est ce qu’elle nous raconte en tout cas. Ce que racontent sa bouche, son corps, ses formes confiantes et tendues vers celui qui viendra. Qu’il s’avance, le curieux, qu’il ose, elle l’accueillera comme il se doit. Elle en a vu d’autres avant lui et ça continuera, qu’il ne s’en fasse pas. Qu’elle n’attende pas trop, surtout. Même si chacun sait pourquoi elle est là, elle a le teint fier et l’habit de celle qui n’a pas l’habitude qu’on ne la choisisse pas. Coquette aux lèvres peintes et aux bijoux de joie. A la chevelure teinte et aux tétons de soie. Ses bas rouges sont un sceptre, la couronne de l’experte, la promesse de l’emploi. La chair voluptueuse et la gorge offerte à qui en voudra, elle s’amuse de ce qu’elle pourrait peut-être apprendre à ceux qui ne savent pas. Une impératrice du plaisir, la maîtresse généreuse, c’est ce qu’elle nous raconte en tout cas. L’enseignante dont on rêve, celle qui ne juge pas. Qu’elle nous montre, à nous autres, comment s’occuper de ces choses-là. Elle mènera la danse, bien sûr : à sa cour, le bal est une distraction de choix. Elle te vêtira sans peine du costume de la joie. Tu l’aimeras pour celle qui t’aura distrait de l’hebdomadaire célibat… et  tu te seras cru maître quand tu ne fus que l’écolier qui ne retient pas. La semaine suivante, elle oubliera en mère bienveillante de te rappeler que tu ne grandis pas. C’est cette délicatesse qui te fait revenir, pas les caresses, ne crois pas ça. Combien es-tu prêt à payer encore pour recevoir l’étreinte réparatrice, l’enviable bénédiction des filles de joie?
Déshabille-toi. Tu es quelqu’un de bien, elle te le dira. C’est ce que tu te raconteras en tout cas.

Musée des Beaux-arts, Lyon: Nu aux bas rouges, Pablo Picasso, 1901, Huile sur carton marouflé sur bois. H. 67, L. 51,5cm.

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