jeudi 1 août 2013

Musées by Lux, Etude pour une corrida n°2, Bacon


Etude pour une corrida n°2, Francis Bacon








Etude pour une corrida n°2 est une arène intimiste, une étreinte passionnelle entre l’homme et l’animal, la rencontre mortelle de ceux qui croient devoir s’affronter puisqu’ils ne peuvent s’accoupler sans être dénoncés. L’humain ou  la bête, il faut choisir son camp. En attendant, qu’ils nous montrent tous deux combien leur couple est aussi beau que répugnant. Qu’ils nous fassent frémir, qu’ils nous rassurent quant au choix radical mais si pur de la verticale, qu’ils nous bercent de la plate mais si sûre victoire du mâle à deux pattes, de la race civilisée sur l’instinct grossier. Une mise en scène charnelle, c’est l’obscène comédie : le théâtre de l’intime exposé, la mise à mort organisée de ce qu’on ne peut domestiquer. Qu’il semble harmonieux, ce corps à corps, pourtant… et fascinant, l’effrayant accouplement. De l’énergie, de la fougue, de la peur et de l’excitation. La foule collée à la vitre ne perd pas une miette de la monstrueuse confrontation : cautionner l’évidente distribution, ne pas confondre les rôles surtout, distinguer le bien du mal et le bon du truand… or trancher dans la danse à présent entamée fera couler le sang, c’est forcé car une fois les désirs emmêlés, qui pourra croire en l’infaillible discernement ? Le contact quel qu’il soit fait s’épouser les formes, même avec fracas. Ainsi le public uni en perd-il de sa tranquillisante distinction. Qu’on en finisse et tant pis si le vainqueur s’ampute de sa vigueur inculte … une ennemie de toute façon, sinon pourquoi lui ferait-elle mal ? Qu’importe le sacrifice pourvu que l’on gagne… Le laurier ne vaut-il pas tout l’ennui de la rage?  Alors tant pis pour la grimace. Le cou brisé comme le déni empêche de la voir, nous fait croire en la grâce. Et puis la vitre telle un miroir change chacun en bête de foire. Regarde bien : que devines-tu dans le reflet gênant du tableau de verre* que tu observes inconsciemment? Hypocrite spectateur, mon semblable…

* Ce tableau comme nombre d’autres, Francis Bacon l’a voulu dans un cadre vitré.

Musée des Beaux-arts, Lyon: Etude pour une corrida, n°2, Francis Bacon, 1969, Huile sur toile. H. 198,3 ; L. 147,5cm. 

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